Energies renouvelables: "Les objectifs de l'UE tirent les pays vers l'avant"

La réflexion du jour est tirée d'un article paru dans l'express. Voici l'interview en question, les questions posées et plus encore les réponses apportées permettent de mieux comprendre les enjeux écologiques, les conséquences économiques et politiques des objectifs définis au niveau européen.

"L'Union europénne souhaite promouvoir les énergies renouvelables à hauteur de 20% d'ici 2020, mais plusieurs études dénoncent les coûts réels de l'éolien. Le point sur les énergies renouvelables avec Raphaël Claustre, directeur du Comité de Liaison des énergies renouvelables (CLER).

Quelle part réaliste pour les énergies renouvelables d'ici 2020?

L'objectif de 20% choisi par la Commission est tout à fait réaliste, il faut simplement s'en donner les moyens. C'est pas forcément simple car il s'agit de développer toutes les énergies renouvelables dans les secteurs de l'électricité, de la chaleur ou du transport. Actuellement, les énergies qui explosent sont celles de l'éolien et de la biomasse. En 2020, ce sera le photovoltaïque, -l'électricité faite à partir du soleil nldr- et l'éolien off-shore, c'est-à-dire l'éolien sur mer. 

Que pensez vous du  paquet "énergie-climat" de l'Union européenne?

C'est très intéressant car l'Union européenne prend son destin énergétique en main. Cet objectif de 20% pour les énergies renouvelables tire tous les pays vers l'avant. Et c'est d'ailleurs souvent l'UE qui a forcé la France à avancer. Cet objectif global de 20% a été réparti différemment selon les pays en fonction des énergies déjà existantes et du PIB.  En France, il est en fait de 23%, et en Suède de 49%!

La France aurait souhaité inclure le nucléaire dans la part des énergies renouvelables, ou du moins valider le nucléaire comme "énergie propre", qu'en pensez vous?

Elle se trompe de sujet et entretient l'ambiguïté entre nucléaire et énergie renouvelable. Si on lit la directive sur les énergies renouvelables, il s'agit de lutter contre l'effet de serre, de promouvoir l'indépendance énergétique de l'UE et d'encourager le développement local. Le nucléaire ne nous aide pas à grand chose. D'une part, l'uranium est à 100% importé, d'autre part les ressources en uranium sont aussi limitées. D'ici 35 à 70 ans selon les études, les ressources seront épuisées. Enfin, c'est une énergie encore une fois totalement contrôlée par l'Etat où le citoyen et les collectivités locales sont complètement mis de côté. Bref,  le nucléaire, c'est aussi une absence totale de démocratie.

Quelles sont les mesures déjà existantes permettant le développement des énergies renouvelables?

Pour les particuliers, il existe un crédit d'impôt allant jusqu'à 50% sur l'achat d'installations utilisant les énergies renouvelables. Pour les entreprises, il y a un tarif très fort de rachat de l'électricité pour inciter les entreprises à investir dans les énergies renouvelables. Les trois-quart des pays de l'UE utilisent ce type d'incitation. La France a imposé à EDF de racheter, pour le compte de l'Etat, l'électricité issue des énergies propres. En revanche, cela ne concerne que l'électricité, il n'existe rien pour la chaleur. Le Grenelle de l'Environnement a prévu de soutenir la chaleur renouvelable, mais c'est un peu vague. Nous souhaitons que soit créé un fonds spécial pour financer ce type d'énergie.

Est-ce un créneau porteur économiquement?

Oui, il y a une explosion de tous les côtés avec des créations d'emplois, de nouvelles industries... En Allemagne, ils ont dépassé les 200 000 emplois. Il y a des opportunités très importantes dans certaines filières comme le photovoltaïque. Mais les nouveaux acteurs de l'énergie renouvelable ne sont pas forcément dans un esprit de maîtrise des énergies, ce qui est regrettable ...

Il y a controverse sur la rentabilité réelle de l'éolien. Une étude de l'institut Montaigne estime que le coût/énergie annuel complet de l'éolien terrestre est bien supérieur à l'économie réalisée. Qu'en pensez-vous?

Il y a quand même quelques erreurs. Il y a beaucoup de papiers anti-éolien qui sortent en ce moment avec une vision toujours très centralisatrice de l'économie énergétique. Cette étude publiée par l'Institut Montaigne met l'accent sur les coûts engendrés par le renforcement du réseau dans l'éolien. Mais il y a deux poids deux mesures: quand on parle du nucléaire, on ne met pas en exergue ces coûts là ! En plus, la différence de coût entre l'énergie électrique fournie par EDF et celle des énergies renouvelables tend chaque année à diminuer de plus en plus rapidement. L'éolien est une nécessité car il faut développer tous les types d'énergie à notre disposition pour arriver à un mix énergétique. Et répartir sur le territoire le type d'énergie utilisé en fonction de la proximité de cette énergie et l' abondance de la ressource. Les énergies doivent être adaptées au territoire. En outre, une éolienne dure largement 15 ans et se démonte très rapidement. C'est quelques jours de travaux du génie civil. Et il n'y a plus rien après, aucune pollution pour le territoire.

Les Français sont-ils demandeurs?

En France, tous les sondages sur les énergies renouvelables montrent que les Français y sont très favorables. Evidemment la transition ne sera pas facile, il faut gaspiller moins dans nos consommations. Au niveau de la maison, il faut penser à isoler avant même l'installation de chauffeaux solaires isolés. L'incitation est une question d'ingénierie financière. Si on installe un chauffeau solaire, cela va coûter 6000 euros. Avec les crédits d'impôt, il y aura un retour sur investissement de 2000 euros et par la suite 400 euros d'économie par an. Mais dans l'immédiat, l'acheteur voit juste les 6000 euros à débourser. On a besoin de produits financiers proposant des prêts à taux réduits pour développer le recours des particuliers à ces installations."